Avoir et Etre. Parabole du fils prodigue : analyse...

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Message par Imala Lun 19 Jan 2009 - 22:08

Luc 15, 11-32 Traduction Chouraqui et C.Tresmontant

11. Il dit: « Un homme a deux fils.
12. Le plus jeune dit au père:
‹ Père, donne-moi la part de subsistance qui me revient. ›
Il leur répartit la vivance.
13. Peu de jours plus tard, le plus jeune rassemble tout
et part vers un pays lointain.
Il dissipe là son patrimoine en vivant follement.
14. Quand il a tout dépensé, c’est une forte famine dans ce pays.
Il commence à être dans le dénuement.
15. Il va s’attacher à l’un des citoyens du pays,
qui l’envoie dans ses champs faire paître ses cochons.
16. Il aspire à se rassasier des caroubes que mangent les cochons;
mais personne ne lui en donne.
17. Mais, venant en lui-même, il se dit:
‹ Tant de salariés de mon père ont du pain en abondance,
et moi je péris de faim ici.
18. Je me lèverai donc, j’irai vers mon père et lui dirai:
Père, j’ai fauté contre le ciel et devant tes faces.
19. Je ne vaux plus d’être encore appelé ton fils.
Fais-moi comme un de tes salariés. ›
20. Il se relève et vient vers son père. Étant encore loin, son père le voit.
Pris aux entrailles, il court se jeter à son cou
et, se penchant, l’embrasse.
21. Le fils lui dit: ‹ Père, j’ai fauté contre le ciel et devant tes faces.
Je ne vaux plus d’être encore appelé ton fils. ›
22. Mais le père dit à ses serviteurs:
‹ Apportez en hâte la plus belle tunique et l’en revêtez.
Donnez-lui un anneau pour sa main, des sandales pour ses pieds.
23. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons !
24. Mon fils que voilà était mort, et il revit;
il était perdu, et il est retrouvé ! ›
Ils commencent à festoyer.
25. Son fils aîné était aux champs.
En revenant, il s’approche de la maison, entend musique et choeurs,
26. appelle un des garçons et s’enquiert: ‹ Qu’est-ce donc ? ›
27. Il lui dit: ‹ Ton frère est venu. Ton père a tué le veau gras,
parce qu’il l’a retrouvé en bonne santé. ›
28. Mais il brûle et refuse d’entrer.
Son père sort et le supplie.
29. Il répond et dit à son père: ‹ Voilà tant d’années que je te sers,
et jamais je ne suis passé outre à un ordre de toi.
Mais à moi, jamais tu n’as donné un chevreau
pour festoyer avec mes amis.
30. Et ton fils que voilà revient. Il a englouti ta fortune avec des putains,
et tu immoles pour lui le veau gras ! ›
31. Il lui dit: ‹ Enfant, toi tu es toujours avec moi.
Tout ce qui est à moi est à toi.
32. Mais il faut festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voilà
était mort, et il ressuscite; il était perdu, et il est retrouvé ›. »


11. Il dit : Un homme a deux fils.

Un homme a deux fils.
A deux fils, du verbe avoir.
Commentaires au plus près du texte : "comme si c’était là tout son bien… Comme si pour ce père, ce bien était son seul vrai bien : il a deux fils."

Son seul vrai bien peut-être, mais un bien douloureux.
Un bien devant lequel il est muet, et ne sait comment être
Comme si cet homme vivait dans une sorte d’autisme, d’impuissance à entrer en relation avec ces deux fils… que néanmoins… il a.

12. Le plus jeune dit au père:
‹ Père, donne-moi la part de subsistance qui me revient. ›


Avant ? Rien ! Le silence.
Pas une parole avant celle-ci. Pas d’introduction, mais la voix de quelqu’un qui s’élève de manière abrupte, dans un silence différent pour chacun des protagonistes, et comme si le silence était de la partie depuis longtemps dans cette famille.
Comme si le vide relationnel était la norme ici.

Le plus jeune dit au père…

Pourquoi le texte formule-t-il alors son entrée en matière de cette manière : le plus jeune dit au père, et non : le plus jeune demanda ou fit cette demande à son père ? Comme si, dans ce que le plus jeune dit au père, il y a plus que ce qu’il dit…

Père, donne-moi la part de subsistance qui me revient.

Père
Heureusement, il y a ce : Père… Avant toute autre formulation, et qui fais résonner à mes oreilles ce qui va suivre, comme une supplique …

Père, donne-moi

Père, donne-moi... Donne-moi… de quoi vivre, de quoi être heureux… donne-moi ce que je ne sais pas vouloir quand je dis vouloir ce que je veux…
Père, donne-moi ce qui reste loin de moi, et que profondément je ne saisis pas…

Père, donne-moi la vie

Père, donne-moi : donne et non : attribue/alloue/octroie/abandonne/assigne-moi ma part d’héritage, ce qui aurait été une manière bien plus adéquate de formuler ce genre de demande.

Pourquoi alors, dit-il au père (puisqu’il dit au père) —qu’il veut sa part d’héritage ?
Que dit-il vraiment ? - "Père, à défaut de trouver la vie auprès de toi, et comme si tu étais déjà mort, donne-moi ce dont je crois que j’ai besoin pour vivre sans toi et en dehors de toi…"

En demandant sa part d’héritage, il ne sait pas qu’en fait, il demande sa part d’être… comme si il était au pouvoir du père de la lui donner.


A suivre...
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Message par Imala Mer 21 Jan 2009 - 11:02

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant

Il leur répartit la vivance.
Il leur partagea son bien/les moyens d’existence

L’impuissance de ce père à entrer en relation avec ses fils est ici manifeste : il leur répartit la vivance… comme si en terme d'amour et de vie, il ne pouvait que ce geste... il leur répartit la vivance… sans que ne transparaisse le moindre étonnement. Sans aucune discussion.
Sans élever la moindre objection :

- Ne peux-tu attendre que je ne sois plus ?

Sans qu’aucunes questions ne voient le jours :

- Pourquoi ?
- Que veux-tu faire ?
- Que se passe-t-il ?
- As-tu des projets ?
- Quels sont-ils ? Etc.


Sans qu’aucune référence à la mère n’ait été émise non plus.

D’ailleurs, où est la mère ? Que pense-t-elle, que ressent-elle face à ce vide relationnel ? Pas un mot sur elle. Pas un mot d’elle.
Est-elle morte ?
A mon sens, le vide de son absence crie ici plus fort que partout ailleurs dans le texte.


13. Peu de jours plus tard…

Donc rapidement. Donc sans réelle distance d’avec ses émotions, ou absences d’émotions.

…le plus jeune rassemble tout…

Le tragique dans ce verset (ce que la suite du texte va démontrer), c’est qu’il semble croire que ce tout est la clef d’une existence en plénitude.

…et part vers un pays lointain…

Sans même dire : - au revoir.
Sans plus qu’aucune autre parole n’ait été échangée.

Il part dans le mutisme et l’exclusion. Dans l’illusion que ce pays lointain sera "l’Eldorado de plus de vie", d’une vraie vie, et digne d’être vécue.

Exclu de la vie des siens croit-il, il exclu son père et son frère de sa vie, (on exclu les autres que lorsqu’on se croit, à tort ou à raison, exclu soi-même par les autres) – en s’excluant lui-même dans cet exil qu’il choisit en partant vers un pays lointain.

...vers un pays lointain… Au plus loin du père, et du manque que le père représente/actualise dans sa vie, semble-t-il.

…Il dissipe là son patrimoine…

Son patrimoine, son bien, est traduit en grec par le mot [ousia], qui signifie en premier lieu : l’être, l’existence.
Ce qui donne un éclairage particulier sur ce dont il s’agit vraiment pour le cadet : ce qu’il dissipe/disperse là, est bien plus que son argent, il se dissipe/disperse, il disperse son être .
Il ne se rejoint plus. Ne se touche plus.
S’il n’a jamais su qui il était, il le sait moins encore.
Il se fuit et s’abandonne, et ne prends plus soin de lui-même.

…en vivant follement.

...en vivant follement [asotos] = de façon désespérée/sans porte de salut.
En se rejetant de manière inconsciente mais profondément, en s'excluant lui-même de lui-même. On ne s'exclut jamais si bien soi-même de soi-même qu'en ajoutant sensations fortes sur sensations fortes.
Il se coule dirait-on aujourd’hui, en vivant dans l’illusion désespérante qu’il peut combler le vide par l’avoir et que l’avoir peut acheter la joie.

A suivre...
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Message par Imala Jeu 22 Jan 2009 - 18:31

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


14. Quand il a tout dépensé

Il rassemble tout (au verset au verset 13)… quand il a tout dépensé (v.14)…

Deux "tout" qui se renvoie dos à dos : avoir tout lorsque l’on n’est pas, et lorsque fait défaut le sentiment d’exister vraiment, revient à n’avoir rien, et à plus ou moins brève échéance, à être rattrapé par ce rien ! A être comme ayant tout dépensé.

Est-ce étonnant alors qu’une forte famine survienne précisément à ce moment-là ?

…c’est une forte famine dans ce pays. Il commence à être dans le dénuement.
Une forte famine survint dans ce pays, et lui, il commença à être en manque.

Et lui, il commença à être en manque… comme si la famine ne touchait que lui.
Comme si les autres n’étaient pas touchés par la famine... Ce que semble confirmer la suite du texte : il y a des gens que la famine n’a pas touché puisqu’un citoyen du pays a encore des cochons, et que ces cochons peuvent encore manger des caroubes

Lorsque nous souffrons, n’avons-nous pas le sentiment que nous sommes seuls à souffrir réellement, et que les autres sont épargnés, ou tout du moins qu’ils ne souffrent pas ce que nous souffrons ; sous-entendus : autant que nous ?

15. Il va s’attacher…
= Se coller.
Il va se coller à un citoyen du pays qui a et qui est (citoyen), dans un désir d’être et d’appartenance.

… a un des citoyens du pays…

Car lui ne l’est pas. Lui n’est pas et n’est plus citoyen de nulle part. Il n’a plus rien et il n’est rien. Il est un étranger. Au propre comme au figuré. Un marginal et un exclu.

…qui l’envoie…

Pas de relation là non plus. Ce citoyen n’a que faire de quelqu’un qui n’est rien. Il l’envoie garder ses cochons : autant dire qu’il le renvoie.

…dans ses champs faire paître ses cochons.

Un exclu qui s’exclu si bien lui-même, qu’il va même jusqu’à accepter de garder les cochons, faisant fi de cette parole du Talmud, inspiré de Lévitique 11 :7 : "maudit soit l’homme qui garde les porcs" – et actualisant ainsi son sentiment de n’être rien et de ne rien valoir.

16. Il aspire à se rassasier des caroubes que mangent les cochons; mais personne ne lui en donne.

Et il désirait se bourrer (litt. être bourré) des caroubes que mangeaient les cochons, et personne ne lui donnait. C. Tresmontant

C. Trémontant, en traduisant littéralement ce verset, et en omettant (distinction importante) la préposition "en" dans sa traduction, permet, à mon avis, une plus grande cohérence de sens

Il désirait être bourré [chortazô] "engraisser" au passif, évoque plus le besoin du tout petit d’être nourri et totalement comblé à la fois physiquement, et affectivement, plutôt que de simplement vouloir manger.

Etre bourré = ne plus souffrir de ce vide intérieur que la disette dans laquelle il se trouve, a rendu plus criant encore.

Et personne ne lui donnait.

Personne ne lui donnait. Ne lui donnait quoi ? Des caroubes ? A manger ?

Non.
Personne ne lui donnait le sentiment d’être nourri, comblé, plein.
Personne ne lui donnait ce sentiment de plénitude dont il avait désespérément besoin.
Personne ne lui donnait le sentiment de faire partie et de la vie, et de la communauté humaine.
Personne ne lui donnait, et même les cochons étaient mieux lotis que lui puisqu’ils étaient nourris eux, au moins…

Si il n'y avait eu réellement qu'une question de nourriture, qu’est-ce qui l’empêchait de prendre de ces caroubes et d'en manger ?
Pourquoi attendre des autres ce qu’il pouvait faire par lui-même ?
Personnellement, je pense et crois vraiment que cette constatation : personne ne lui donnait, renvoie à des questions plus profondes : personne ne lui donnait... personne ne l’aimait : comme en écho !

L’enfermement dans l’exclusion et le sentiment de non existence, est ici criant.

(A suivre...)
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Message par JPG Dim 25 Jan 2009 - 1:44

Je vous lis et attends la conclusion avant de vous donner mon point de vu.

Sachez déjà que ma référence est JN Darby.

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Message par Imala Dim 25 Jan 2009 - 18:33

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant

Personne ne lui donnait… Exilé bien avant son exil volontaire par ses sentiments de non appartenance, de non intégration, il avait pris de force ce qui devait combler croyait-il, son manque profond, son vide affectif et spirituel, mais sa situation ne fait qu’empirer, et acculé par des conditions de vie devenues extrêmement précaires, il ne peut plus reculer devant ce qui commence à se faire jour en lui-même. Il prend alors conscience de ses pensées profondes :

17. Mais, venant en lui-même, il se dit: tant de salariés de mon père ont du pain en abondance, et moi je péris de faim ici.
17. Et, venant en lui-même, il disait : Combien de salariés de mon père ont du pain en surabondance, et moi de famine je suis perdu ici !

Qu’en sait-il ? La famine aurait pu tout aussi bien sévir dans le pays du père, et ainsi léser également les salariés du père. Vision des choses phantasmatique, irrationnelle, et qui dit combien cet homme est l’otage de ce qu’il vit/ressent. D’autant que les salariés/mercenaires n’étaient rémunérés qu’au mérite, leur salaire dépendait strictement du travail accompli : moins de quota = moins de salaire ; plus de quota = plus de salaire.

Néanmoins, il en est, pour malheureuses qu’elles soient, de certaines situations, comme autant d’opportunités à saisir pour un retour sur soi fécond… même si ce retour sur soi commence toujours par vouloir entériner/valider le mouvement qui nous a fait nous détourner de nous-même et des autres !
Le cadet, en comparant sa situation à celle des salariés de son père plutôt qu’à tout autre situation, en pensant qu’ils surabondent de pains, [perisseuô] un verbe d’état = jouissent d’un excès de vie, d’une existence comblante, révèle ainsi combien est profonde la dévalorisation de soi dans laquelle il vit : il se ressent inférieur aux salariés de son père. Il cultive ainsi l’idée que les salariés de son père ont la vie en abondance parce qu’ils la méritent, c’est leur salaire. Sous-entendus : moi, si je n’ai pas cette vie en plénitude c’est que je ne la mérite pas.

Mais, aspect positif, il exprime en filigrane, aussi et pour la première fois, son sentiment d’exclusion : les salariés de mon père ont du pains en surabondance et moi, de famine je suis perdu ici, comme si il commençait également à se rendre compte qu’il s’est mis de lui-même dans cette situation. Et alors qu’il aurait pu continuer de céder au besoin réactif d’exclure les autres, et s’enfermer dans le ressentiment et la jalousie : mon père ne s’inquiète pas pour moi, ses salariés sont mieux lotis que moi… il fait un retour (cf. Mat.3:2), et ce faisant : un pas vers l’inclusion !

De famine je suis perdu ici : perdu [apollumi] verbe, dans le Nouveau Testament qui désigne une "perdition radicale", existentielle et spirituelle, démontre que le cadet a une conscience douloureuse de ce qu’il souffre en profondeur : la pensée consciente que d’autres semblent vivre une existence pleine alors que lui est ravalé au rang de paria.

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Message par Geveil Lun 26 Jan 2009 - 0:24

La suite, la suite, la suite.......
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Message par Imala Mar 27 Jan 2009 - 20:18

Gereve a écrit:La suite, la suite, la suite.......

:sri:


________________________________________________________________________

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


18. Je me lèverai donc, j’irai vers mon père et lui dirai:
Père, j’ai fauté contre le ciel et devant tes faces.


Je me lèverai donc, jirai vers mon père et lui dirai : au futur.
Le cadet, pour se donner du courage, visualise l’action qu’il prévoit de faire ; il est encore dans l’intention.

Se lever : sortir du sommeil, de la zone, du somnambulisme, du no Mans land . Sortir du déni.
Marcher : avancer dans l’action initiée, affirmer et affermir la décision prise
Parler : s’avancer en première personne, se dévoiler.

Se lever, marcher, parler : = sortir de ses "morts" ; aller dans le sens d’une confiance à venir, à construire ; poser les bases de cette construction.

Dans ce dialogue avec lui-même, le cadet refait surface. Il rassemble ses forces, se rassemble.
Il n’y a pas là, à proprement parler, de mouvement de repentance, comme trop souvent enseigné dans l'église, mais l’amorce inconsciente d’une dignité qui se fait jour.

Chaque fois qu’un être humain sur cette terre, se lève, se met en marche et puis parle en première personne, la vie triomphe sur la mort.

Père, j’ai fauté contre le ciel et devant tes faces

Père, j’ai fauté… le père n’avait pourtant fait aucun reproche, n’avait ni désapprouvé son départ, ni même demandé d’explications !
D’où lui vient ce sentiment d’avoir fauté contre le ciel et devant les faces du père ?
En fait, le sentiment d’exclusion induit toujours un sentiment de culpabilité : si je suis exclu, c’est que j’ai dû faire quelque chose de mal, ou que je suis nul.

Père, j’ai fauté… la faute n’est pas précisée, et contre le ciel et devant tes faces reste une formulation très vague. Le cadet n’avoue pas une culpabilité concrète, mais traduit l’expression de son sentiment de culpabilité.

19. Je ne vaux plus d’être encore appelé ton fils.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils

Sentiment de culpabilité tellement virulent qu’il pense avoir également perdu son identité de fils.
Je ne suis plus digne… Mais s’est-il jamais senti réellement digne ? La culpabilité l’empêche de se poser la question. La culpabilité inverse les choses : je suis coupable, donc je n’ai plus le droit à être; ni même à "être ton fils".

C’est ainsi que l’on s’explique les choses : c’est la faute qui induit et explique l’exclusion : - je suis coupable, et je suis exclu parce que je suis coupable… alors que c’est le contraire : c’est parce que je ne crois pas à mon droit à être, c’est parce que je me crois exclu, que je me déclare coupable !

Force est de constater que le texte ne donne aucun contenu à cette prétendue faute. Respecter le texte, c’est respecter le silence du texte au sujet de cette culpabilité. Ce n’est pas parce qu’il se sent coupable, qu’est automatiquement conféré le droit de le déclarer coupable.

Fais-moi comme un de tes salariés.
Traite-moi comme un de tes salariés

Lorsque l’on sait que les salariés en ce temps là, et dans cette culture là étaient au plus bas de l’échelle sociale, considéré comme des étrangers, embauchés/engagés ponctuellement et pouvant être renvoyés sans préavis, considérés même comme étant inférieurs aux esclaves qui eux faisaient partie de la famille du maître, ou même encore au simple serviteur, qui lui, était subordonné aux esclaves, on peut se faire une petite idée non seulement de ce que le cadet ressent, mais de ce qu’il demande !

Le cadet ne se sent plus appartenir à cette famille. Mais a-t-il jamais bénéficié réellement de ce sentiment d’appartenance ? S’est-il même jamais sentis inclus dans l’existence sans avoir à le mériter ?
Est-ce si surprenant alors de l’entendre dire : -traite-moi comme un de tes mercenaires/salariés ? Car, étonnamment, aucun salarié n’est mis en scène dans la parabole, il semble qu’ils ne soient nommés que pour ce qu’ils représentent : le sentiment d’inexistence du fils.

Cette parole alors : fais-moi comme un des tes salariés, peut résonner ainsi : fais de moi quelqu’un qui n’a aucune place dans la famille, ni aucune relation avec toi = fournit-moi la preuve de mon inexistence !

N’est-ce pas là une manière détournée, et à son insu, de dire son tourment de tout temps, son mal profond ?

Son système de croyance l'induit à penser qu'il n'y a qu'un type de relation possible : celle fondée sur le mérite, et sur le salaire.

Ceci encore : fais-moi… deuxième supplique à mes yeux.
Fais-moi autrefais-moi autrement… crée-moi… fais-moi… de façon à ce que j’existe.

(A suivre…)
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Message par Geveil Ven 30 Jan 2009 - 16:18

Encore,encore.....
Mais fallait-il une parabole pour en arriver à ta vision des choses ?
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Message par Imala Ven 30 Jan 2009 - 20:12

Encore,encore.....
Mais fallait-il une parabole pour en arriver à ta vision des choses ?

Et pourquoi pas une parabole, lion de mon coeur ? :D

Je n'en fais pas état tous les dix mots, ou dix messages, et on a peut-être tendance à l'oublier, mais je suis croyante, et, cohérente avec ma foi, je sonde les textes bibliques... et y trouve des perles de grands prix !! :sri:

Les histoires que Jésus raconte dans ses paraboles, relèvent toutes d’une "invitation au voyage", c’est une histoire qui en cache une autre, encore non dite, et dont je suis co-narrateur, co-narratrice.
L’imprécision des motivations et des sentiments des personnages, sollicite le dire de celui qui entend la parabole. Les blancs que laisse le Christ dans le récit permettent à celui qui l’entend de corriger, ou compléter ce qui est dit au moyen de sa propre histoire, et ainsi, de la faire venir réellement à sa conscience…

*** *** ***

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant




20. Il se relève et vient vers son père.
Et s’étant levé, il alla vers son père

J’ai eu l’impression que ces deux actions (se relever et aller) étaient comme simultanées, comme si la distance entre le lieu du père et le lieu du fils n’existait pas vraiment, ou était minime, bien qu’il soit dit au verset 13 qu’il s’absente dans un pays fort lointain (C. Tresmontant).
Je me pose alors la question : comment, depuis ce pays fort lointain, fait-il pour revenir chez le père sain et sauf, en bonne santé dira un serviteur a l’aîné (27), si c’est réellement de faim qu’il périt ?... - et moi je péris de faim ici !

Et s’étant levé, il alla vers son père… S’étant levé [anastas] il alla vers son père = même verbe que le Nouveau Testament utilise pour parler de la résurrection.

Se lever : sortir de la zone ai-je dit, ne plus "zoner dans ses morts", sortir de ses cercles vicieux… et, se faisant, se donner à voir… Le père voit son fils, alors même que le fils est "encore loin".

Étant encore loin, son père le voit. Pris aux entrailles, il court se jeter à son cou.

Comment cela se fait-il ?
Il est invraisemblable, au su du silence dont fait état les premiers versets, de penser le père guettant son fils depuis tout ce temps.

… Il n’est pas rare qu’une distance physique soit des plus bénéfique lorsque les relations sont comme mortes, lorsque plus personne ne voit personne, lorsque plus personne ne voit l’autre pour qui il est, et où il est attendu de chacun qu’il joue le rôle permettant aux autres de continuer à fonctionner plutôt que de vivre vraiment, tant il est vrai que vivre vraiment, met en danger l’équilibre précaire dans lequel chacun s’est enfermé.

Pris aux entrailles, il court se jeter à son cou.

Cette distance/absence a permis que quelque chose change chez le père, il est sorti de son apparente indifférence, c’est un homme en attente, et si il ne guettait pas réellement son fils, il est malgré tout comme aux "aguets", sur le qui vive, et alors qu’il n’avait fait aucune remarque, était resté dans un mutisme indifférent (?), douloureux (?) confus (?), alors qu’il était aussi inexistant que la mère inexistante, soudain il se manifeste, et de la manière la plus vivante qui soit. Non seulement, il voit son fils, (enfin ! pourrait-on dire) mais il est pris aux entrailles.

… Si quelque chose a changé chez le père, quelque chose a changé chez le fils aussi, changement qui a commencé dès le moment où il prend la parole pour demander sa part d’héritage. De passif, il devient actif. Confusément, il désire ce changement depuis longtemps et de toutes ses forces, et même si dans un premier temps, il se trompe de but, grâce à lui, les choses se mettent néanmoins à bouger dans cette famille.

Pris aux entrailles… Tant que chacun jouait son rôle au sein de la famille, tant que régnait la peur, la dépendance, l’absence de liberté (l’aîné en fera la démonstration manifeste) il est impossible de voir l’autre pour qui il est vraiment, et dans sa vulnérabilité.
C’est la distance dans l’absence qui permet au père de s’éveiller lui aussi, de sortir de son aveuglement, de voir enfin son fils dans son dénuement, au point d’en être bouleversé, ému de compassion. Compassion profonde, authentique, et qui l’emporte sur toute autre considération, au point que rien ne pourra la tempérer.

… il court se jeter à son cou et, se penchant, l’embrasse.


"Un notable oriental ne court jamais nulle part en robes flottantes. Agir ainsi est humiliant. " écrit K.E. Bailey.
Ce qui démontre alors avec d’autant plus d’impact, le changement opéré.

Le père reste muet pourtant.
A aucun moment dans la parabole, il ne parlera au cadet, comme si cela lui était impossible, ou comme si il était impossible de dire et qu’il fallait s’en tenir au geste

N’est-il pas vrai que devant l’autre, quelque soit cet autre, au prise avec une culpabilité mortifère, parler ne sert à rien ?
Et qu’il faut agir plutôt ?
Alors le père laisse parler ses émotions, sans retenue aucune, sans gêne, ni fausse pudeur, sans peur d’embarrasser son fils.
Ce père inexistant en tant que père au début de la parabole, non seulement accueille son fils sans aucune retenue, mais avec toute la tendresse débordante d’une mère.

21. Le fils lui dit: ‹ Père, j’ai fauté contre le ciel et devant tes faces.
Je ne vaux plus d’être encore appelé ton fils.

Le fils reste comme raide, emprunté, préoccupé que de lui-même, (il ne prend ni le temps de saluer son père, ni de lui demander comment il va) empêtré dans sa culpabilité, et dans son besoin de maîtriser, quelque peu, d’une quelconque manière ce moment, il entame malgré tout son laïus.
Alourdit par ses sentiments négatifs, il lui est difficile d’entrevoir un autre happy end que celui imaginé du fond de son désarroi, ainsi que de recevoir les preuves d’accueil et d’affection de son père.

Que va devenir son aspiration profonde, son besoin d’appartenance, son besoin d’être reconnu digne d’exister et fils de quelqu’un ?
Pourra-t-il prendre enfin part au "festin" de la vie ?
Nous ne le savons pas.
Le texte ne laisse rien entrevoir, si ce n’est ceci, en creux, dans la parole préméditée mais qu’il taira néanmoins : il ne dira pas : traite-moi/fais-moi comme un des tes salariés.
Il semble que l’attitude du père le lui interdise, l’en empêche... il est là, comme désarçonné, et peut-être commence-t-il à entrevoir que le but de la vie n’est pas de gagner son existence par des mérites quelconques…
Ce silence, cette parole tue, supprimée, résonne comme lourde de promesse et laisse entrevoir que le cadet est en chemin.

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Message par Imala Mer 4 Fév 2009 - 9:53

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


22. Mais le père dit à ses serviteurs:
Apportez en hâte la plus belle tunique et l’en revêtez.
Donnez-lui un anneau pour sa main, des sandales pour ses pieds.


Mais le père dit à ses esclaves :
Vite sortez le plus beau vêtement
(litt. le premier) et habillez-le, donnez un anneau dans sa main, et des sandales pour ses pieds.


Mais…

Le père refuse que s’installe un climat lourd, il est tout à sa joie, et son désir d’y voir entrer son fils est pressant ! Il aspire à lui faire comprendre combien lui, le père, tient, et a besoin, lui aussi, de cette relation : - "Vite"dira-t-il !

Il court encore, ne se tempère ni ne tempère l’urgence qu’il ressent à devoir faire les gestes servant à affermir la relation qui vient de se rétablir, car à imaginer comment les choses pourrait tourner : le fils à jamais perdu dans sa culpabilité, dans son besoin de mériter, perdu pour lui-même et pour le père, il y a effectivement urgence. Néanmoins, c’est aux serviteurs qu’il parle, et si le fils est implicitement invité à entrer dans cette joie, il sait qu’on ne force personne à se réjouir… et c’est avec tact qu’il se tourne vers les serviteurs, laissant à son fils le temps d’intégrer, d’atterrir…

Vite sortez le plus beau vêtement (litt. le premier) et habillez-le, donnez un anneau dans sa main, et des sandales pour ses pieds

Le "premier" vêtement : symbole de respect de soi, de dignité
Un anneau : symbole d’autorité et d’identité
Des sandales : symbole de liberté (les esclaves marchaient pieds nus)

Tout y est. Le fils voit l’objet de son désir, et de son besoin le plus profond être à portée de main. Ne lui reste plus qu'à faire les gestes d’appropriation...

Un homme a deux fils…

Il ne suffit pas d’avoir deux fils pour être père. Il faut le devenir, et pour le devenir il faut "un voir " qui prenne aux entrailles.

En proie à une vive émotion, le père emploie six impératifs qui font penser à l’accueil d’un nouveau-né :
- sortez
- habillez-le
- donnez
- apportez
- tuez (préparez à manger)
- réjouissons-nous.

Dans bien des cultures, tout vrai père, tout père heureux d’être père, et désireux que soit établi, reconnu qu’il est devenu père, fait les gestes qui sont décris ici…

Mais avant tout, celui qui est né ici, ce n’est pas le fils, c’est le père, et au travers des gestes et de la joie de ce père, il est alors donné au fils l’opportunité d’intégrer sa naissance, et son identité de fils.

Le père en cet homme a pris, repris ( ?) vie.
De passif qu’il était, voir effacé et mal à l’aise avec ses fils (il accepte sans broncher de partager l’héritage de son vivant, il laisse partir le cadet et ne va ni le chercher, ni n’attend réellement son retour), —fait tout à coup ici, la démonstration d’une affirmation de soi heureuse, et propre à mettre en vie.

Pris aux entrailles : la compassion lui donne à comprendre que ne pas exclure à nouveau ce fils qui l’avait exclu de sa vie, lui permet de ne pas rester exclu lui-même.
Il comprend qu’il est vital d’entrer en relation, même conflictuelle, même bancale, on ne saura jamais comment le cadet répond au père, — plutôt que de n’en avoir aucune (l’exil, l’absence nue).

23. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons !
24. Mon fils que voilà était mort, et il revit;
il était perdu, et il est retrouvé !
Ils commencent à festoyer.


23. et apportez le veau gras, tuez-le, mangeons et réjouissons
24. Parce que celui-ci, mon fils, était mort et il a repris vie, il était perdu et il a été trouvé. Et ils commencèrent à se réjouir.


Que dit le père ?

Etant sans nouvelle de mon fils je le croyais mort ?
Du moment où il a demandé son héritage, je l’ai considéré comme mort pour moi ?

Non. Le "voir" du père : or, comme il était encore à distance, au loin, son père le vit et il fut ému aux entrailles — est un "voir" qui va au-delà de la vision physique.
Il comprend qu’il y a là réellement une question de vie ou de mort.

Tout être humain est fondamentalement étranger à l’existence, démuni, livré à lui-même, en attente et en dépendance poignante des autres, le père le comprend au moment où voyant son fils encore au loin, il est saisi aux entrailles.

Et il revit
Et il a repris vie

Manière extrêmement forte de dire que lui-même était comme mort, car ne (re)prends si bien vie à nos yeux, que ce que nous finissons par voir alors que nous sortons de nos divers engourdissements.

il était perdu

Synonymes de perdu : égaré/abandonné/disparu/oublié/abandonné

Il était perdu/égaré, et non pas je l’ai perdu, je l’ai abandonné/oublié/égaré ; ni même : il s’est perdu, il s’est égaré. Précision importante, qui permet aux divers pièges de la culpabilité d'être évités.

Il était perducomme si cela n’était la faute de personne.
Comme si il n’y avait là pas de faute à proprement parler, mais quelque chose d’inhérent à la vie.

et il est retrouvé !
et il a été trouvé !

Non pas : je l’ai retrouvé ou j’ai retrouvé mon fils perdu.

Et il a été trouvé = verbe au passif, comme si personne n’y était pour rien et comme si le père avait cru que son fils ne reviendrait jamais.
On comprend mieux dès lors qu’il ait pu dire : mon fils que voilà était mort. L’éloignement extrême tant physique qu’affectif, induit par l’absence affective et émotionnelle du père, puis par l’exclusion du fils, avait réellement entraîné la mort : la mort de toute relation entre ce fils et ce père.

Si le père ne dit jamais : "j’ai retrouvé le fils que j’avais perdu" c’est qu’il n’y est pour rien, c’est qu’il y a là quelque chose qui appartient en propre au fils cadet : il a fait le premier pas de l’inclusion dans l’existence, il a commencé à se trouver lui-même, et en employant la voix passive, l'auteur de la parabole donne à entendre que "le père laisse le mystère de Dieu envelopper cette démarche dont il n’est que le témoin".

Tuez le veau gras… Ils commencent à festoyer.

Cette fête ressemble à la fête due à une naissance ai-je dit…
La relation entre le père et le fils est née, et ce jusque dans les entrailles vivantes du père, relation qu’il ne voudra plus perdre, et qu’il voudra également créer avec son fils aîné.

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Message par Imala Jeu 12 Fév 2009 - 9:19

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant

25. Son fils aîné était aux champs. En revenant, il s’approche de la maison, entend musique et choeurs
Mais son fils aîné était aux champs. Et quand à son retour, il s’approcha de la maison, il entendit de la musique et des danses.

C’est bizarre quand même ce mais son fils aîné était au champs !
J’ai ce commentaire tout près des lèvres : - la belle excuse, tiens !

Car tuer, (et tuer de manière cachère), dépecer, laver et cuire un veau gras, ça prend du temps. Réunir les convives et agencer les préparatifs d’une fête aussi…

M’est avis que l’aîné est aux champs bien longtemps !!

Il entendit de la musique et des danses…

L’aîné perçoit les signes extérieurs d’une effervescence inhabituelle, et son premier réflexe est de s’arrêter…
Il ne presse pas le pas, il agit comme une personne en proie à un sentiment de méfiance : il appelle un jeune serviteur
A la place de se dépêcher pour voir par lui-même ce dont il est question, ce que tout homme bien dans ses baskets (dans sa tête et dans son cœur) -aurait fait, il appelle un jeune serviteur… Comme si spontanément il fuyait tout ce qui s’apparente à des réjouissances, comme si il était de ceux qui n’aiment pas les rassemblements, les agapes...

26. Il appelle un des garçons et s’enquiert: - Qu’est-ce donc ?
Et ayant appelé un des serviteurs, il lui demandait ce que cela pouvait bien être.

On peut penser que l’aîné est incapable d’entrer alors même qu’il n’est pas encore informé de l’arrivée de son frère.

v27. Il lui dit: - Ton frère est venu. Ton père a tué le veau gras, parce qu’il l’a retrouvé en bonne santé.
Il lui dit : - Ton frère est là, et ton père a tué le veau gras parce qu’il l’a reçu en bonne santé.

Il s’enquiert auprès d’un serviteur, jeune de surcroît, [païades] le premier sens de [païs] étant enfant, - de ce qui se passe chez lui, dans sa maison, plutôt que d’y aller voir par lui-même, ou de se mettre en quête de son père afin d’être ainsi, informé de la meilleur des manières… C’est l’acte d’un fils qui n’est pas proche de son père, ou qui ne considère pas son père proche de lui ; et en ce sens, c’est l’acte de quelqu’un qui souffre aussi d’un sentiment d’exclusion, et dès lors on comprend mieux pourquoi il ne hâte pas le pas aux bruits de la fête.

Sentiment d’exclusion qui ne peut être encore que renforcé par le fait même qu’on ne tuait le veau gras qu’en cas d’événement très exceptionnel : c’était l’indice d’une joie extrême. Et lui, l’aîné, n’avait pas été consulté pour une décision si importante, personne n’avait ni même attendu son retour.

Il semble qu’une fois de plus, tout s’est fait sans lui, sans que le père ne le consulte.

Pensez : n’était-il pas concerné au premier degré, puisque, en principe, le père ayant partagé les moyens d’existences, il n’avait que l’usufruit des biens revenant à l’aîné ? Et n’étais-ce pas à lui, l’aîné, que reviendrait d’avoir à assumer le coût de cette fête ?

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Message par Imala Lun 16 Fév 2009 - 13:58

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


Le père dira : il fallait… comme une excuse !
Qui résonne comme : je n’ai pas pu faire autrement

V.27 Il lui dit : ton frère est là !

L’aîné entend ton frère est là, et parallèlement, il entend la musique et les chœurs, alors il entend ton frère est là comme si il n’entendait que cela !

Il entend ton frère est là, alors il entend : il est avec le père, il est dans la maison, (alors que moi je suis dehors !!) il est dans la joie, —bien qu’il ignore réellement tout de l’état affectif et émotionnel dans lequel se trouve son frère.

Oui, une fois de plus : je ne suis pas consulté, mon frère est décidément le chouchou de mon père ! Une fois de plus il a le droit d’exister quand moi je n’ai que celui de servir, et de… payer !

Le sentiment d’injustice qui a certainement été le sien à ce moment-là a dû être terrible. Le chagrin aussi. Tout ce temps passé à n’avoir fait que travailler pour mériter l’estime, l’amour du père et voir tous ses efforts anéantis en cette seule minute !

Ton père l’a reçu…
Le père n'avait pas dit : "je" l’ai retrouvé, mais il a été trouvé… Pourtant le jeune serviteur dit : ton père a tué le veau gras parce qu’il l’a reçu en bonne santé.
En demandant des renseignements à un jeune serviteur, il ne pouvait être mis au courant de ce qui se passait vraiment que très partiellement, succinctement.

Ton père l’a reçu… associée aux bruits de la fête, cette parole peut tout à fait résonner ainsi aux oreilles du cadet : ton père l’a reçu comme un cadeau ! Un cadeau rare et précieux…

En s’adressant au jeune serviteur plutôt qu’à son père directement, c’est comme si l’aîné se donne les moyens de n’entendre que ce qu’il voulait entendre = tout ce qui ne peut que renforcer son sentiment d’exclusion !

Ceci encore :

Mais son fils aîné était au champ

Mais : conjonction de coordination : mais entre le v. 24 et le v.25 … et ils commencèrent à se réjouirmais… l’aîné était aux champs, comme si la joie pour le père ne pouvait être complète sans le fils aîné ! Ils ne font que commencer à se réjouir…

Pourtant, comment l’aîné pourrait-il en être conscient puisque lui, personne ne le "voit de loin", ni ne guette son retour, ni ne se précipite à sa rencontre pour l’inclure au plus vite à la fête et qu’il n’est à aucun moment, question de compassion pour lui ?!

Finalement, l’aîné pouvait tout à fait penser, ressentir et croire qu’il n’avait pas de place propre chez lui, et que sa présence ou son absence ne faisait aucune différence


(A suivre…)
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Message par Imala Mar 24 Fév 2009 - 19:25

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant




28. Mais il brûle et refuse d’entrer…
Alors il fut pris de colère et ne voulait pas entrer.

Entrer, c’était se nier, nier ce qu’il ressentait depuis longtemps, qui couvait et qui, enfin, vient à la surface. Au su de ce qu’il répondra au père, on peut même dire, sans se tromper beaucoup : entrer ç’aurait été continuer à se nier.

Ne pas entrer, dans un premier temps, donner libre cours à sa colère, était ce qu’il pouvait faire de mieux pour lui-même et pour la relation entre son père et lui.
Ne pas entrer, exprimer sa colère, exprimer ce qu’il ressentait au fond de lui, c’était créer l’occasion pour que quelque chose de neuf, intervienne enfin entre le père et lui.

Ne pas entrer, c’était dire, en substance :
- ça suffit ! Stop ! Je ne joue plus !

Ne pas entrer, c’était enfin aller au-devant de la vérité. C’était prendre conscience de ce qui l’avait motivé à être celui qui:
- ne se plaint jamais.
- ne demande rien.
- ne prend rien.

Qui reste dans la maison du père, collé au père comme le cadet collait au citoyen, —et qui le sert.

Collé au père, en quête d’identité, de reconnaissance, en quête d’amour…
Qui ne dit pas : - Père, donne-moi… Mais qui enquête inconsciemment sur sa part d’être, qui la cherche… et ne la trouve pas.

…Le cadet se croyant exclu de sa place de fils, voulait être traité comme un des salariés du père ; l’aîné se croyant exclu de sa place de fils dans la maison du père, se sentant esclave plutôt que fils, reste au dehors avec le jeune serviteur… même mouvement intérieur, conduisant au même mouvement extérieur.

Le cadet était entré en lui-même, et avait peu à peu eu connaissance de ses pensées profondes, et c’est depuis le terrain de sa culpabilité mortifère qu’il s’était mis en marche.
L’aîné, dans son impuissance à faire un pas de plus, dans son incapacité à entrer, à s’inclure dans la joie et la fête, prend brutalement conscience du poids de colère et d’accusations qui le tenaille, et lui ne marche plus !
Il s’arrête. Au propre comme au figuré.

Aucune prise de conscience, aucune évolution intérieure ne se fait sans passage par un désert relationnel.

La différence entre l’aîné et le cadet, est que là où l’aîné accuse, le cadet s’accuse.
Mais la souffrance des deux frères est la même.

Le cadet souffre de ce qu’il croit ne pas pouvoir mériter d’être aimé, ni valorisé, et l’aîné de ce que croyant le mériter, il ne se sent ni aimé, ni valorisé.

L’un et l’autre pourrait tout a fait dire : - que j’aie bien ou mal agis, je ne suis pas aimé pour moi-même.
Ou : - je n’ai pas assez mérité d’être aimé, ou encore : - je me ruine à le mériter, (en allant jusqu’à garder des cochons ; en servant sans jamais rien demander) mais de toutes façons, jamais je n’y parviendrais ; tout ce que je pourrai bien faire, ne sera encore jamais assez !

Ce qu’ils ressentent l’un et l’autre, s’élève à partir de la même base : le sentiment de ne rien valoir, de ne pas être aimé, et d’être exclus de la vraie vie.

Comme pour le cadet, nous ne saurons pas ce que cet arrêt aura initié dans la vie de l’aîné, nous ne saurons pas si il a pu recevoir l’amour du père...
...Enfant… dira celui-ci !
Enfant !… à cet homme rude et dur à la tache !
Enfant… mot chargé d’un poids de tendresse infinie, et qui fait écho à cette autre parole : il fut émus aux entrailles.
La compassion du père pour le cadet, se manifeste là également pour l’aîné, mais tout comme pour le cadet, nous ne saurons pas si l’aîné a pu être pacifié, consolé.

…Son père sort et le supplie.
Mais son père étant sortit, le suppliait.

Ce père là n’a plus rien à voir avec le père du début de la parabole. Ce père là, en sortant de son indifférence, de son "autisme", de son mutisme, du rejet de son cadet, et de ses propres penchants à l’exclusionest, est né dans les "souffrances de l’enfantement".
Il a conquis, sur le fond sombre de sa propre aliénation à lui-même, les sentiments d’accueil, et d’inclusion, ainsi que d’une appartenance à l’existence qui lui étaient indispensables pour faire face à la détresse de ses fils.

Etant sorti…
En refusant d’entrer, l’aîné exclu le père.
Mais le père, ne faisant aucun cas de l’humiliation que cela suppose vis-à-vis de ses convives, ayant refusé l’exclusion du cadet, refuse également celle de l’aîné, il sort ! Il sort et instaure ainsi une proximité avec ce fils qui refuse d’entrer.

Le père rejoint l’aîné là où il se trouve : dehors ! Hors toute relation, hors toute paix.
Le père rejoint le fils sur son terrain : au sein même de sa souffrance, et il le supplie...

Il le suppliait… à l’imparfait = supplication qui s’inscrit dans l’ordre de la durée, et qui démontre combien le père désire le fils.
Il le suppliait : [parakaléô] = "prier" "appeler auprès de" ; puis "appeler à son secours", et encore "inviter/convier", et enfin "exhorter" et "consoler"

Riche de sens n’est-ce pas ce : il le suppliait !

C’était lui démontrer combien il désirait sa présence et son bien. Désir induit par les mêmes sentiments de compassion ressentis envers le cadet.
Compassion profonde qui ne s’embarrasse pas de honte, il s’abaisse, il le supplie…

Mais le fils aîné refuse d’entendre cette supplication et tout ce qu’elle implique en terme de vie. Il exclut le père, et le frère, et la fête, et la joie… et, du même coup, s’empêche de se sentir inclus.

A suivre…


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Message par Imala Jeu 26 Fév 2009 - 15:55

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


29. Il répond et dit à son père: ‹ Voilà tant d’années que je te sers,
et jamais je ne suis passé outre à un ordre de toi.


En réponse, il dit à son père : voila tant d’années que je vis en esclave pour toi, et jamais je n’ai passé outre à un ordre de toi...

Au su de l’indifférence paternelle, manifestée envers la demande du cadet concernant sa part d’héritage, comment se fait-il que l’aîné n’ait jamais osé (?) tenir tête à son père ?

… Il semble qu’il y ait une peur archaïque et dont nous faisons tous l’expérience : si je m’affirme comme individu séparé, je serais exclu !

Si rien ne vient contrecarrer cette peur, aucune parole, aucun geste signifiant, accueil inconditionnel, inclusion dans un amour donné, aucune adoption dans l’Esprit ne souffrant aucune remise en question, alors la peur de l’exclusion prendra constamment le dessus. Et si le père du début de la parabole avait été le même que celui de la fin de la parabole, si rien n’avait transformé cet homme qui a deux fils, mais qui n’est père de personne, la peur du fils d’être exclu ne trouverait aucun lieu où se dire, et c’est bien parce que le père a changé, que la peur de l’aîné peut venir à sa conscience.


Mais à moi, jamais tu n’as donné un chevreau
pour festoyer avec mes amis.

et à moi tu n’as jamais donné un chevreau pour que je me réjouisse avec mes amis.

Le père pourtant, avait partagé ses biens entre ses deux fils, l’aîné avait donc reçu sa part d’héritage.

Dire au père : "à moi tu n’as jamais donné un chevreau" c’était dire autre chose.

Le fils aîné méconnaît sa quête profonde, et l’amertume, les ressentiments dus à une trop longue négation de lui-même, et de ses vrais besoins le submergent.

- … Je vis en esclave pour toi
- ...A moi tu n’as jamais donnépour que je me réjouisse avec mes amis

Pas de joie de vivre pour ce fils là, jamais.

On pourrait presque entendre ces plaintes ainsi :
- a moi tu n’as jamais rien donné !
- Tu ne m’as jamais inclus dans ta vie.
- Tu ne m’as jamais considéré comme fils aîné, ni même comme fils tout court, d’ailleurs
- n’est-il pas vrai que je t’ai servi comme un esclave sert son maître ?
- Et tu ne m’as jamais relevé de cette position, tu t’en es contenté, elle servait tes intérêts

Quelle souffrance cachée, a échappé au fils comme au père ?

Il semble que l’aîné se soit interdit de vivre, et cela sans même en avoir conscience.

De même que le cadet qui attendait que quelqu'un lui donne, l’aîné dit n'avoir jamais rien reçu.
Il y avait donc une attente similaire chez l'aîné, il attendait aussi que quelqu'un lui donne, s'interdisant ainsi de vivre libre et par lui-même.

Pas plus que le cadet, il ne croyait à son droit à l’existence. Et si le cadet à essayé de chercher de toutes ses forces à être inclus dans la vie en fuyant la maison paternelle, excluant ainsi sa famille de sa vie, pensant pouvoir acheter ce qu'il cherchait au moyen de ses biens, l'aîné c'est en restant au plus près du père, dans la maison familiale, et au travers de son obéissance rigide qu'il a essayé, lui aussi, d'acheter ce droit, cette part d'être.

Le cadet avait dit :
- père, donne-moima part d’héritage
L’aîné dit :
- à moi tu n’as jamais donnéun chevreau.

On entendrait presque : même pas. A moi tu n’as même pas donné un chevreau…

Le père voyant la misère de son fils cadet avait dit : sortez le plus beau vêtement, donnez un anneaudes sandales

Et là, entendant la misère de l’aîné, il dira, (mais là seulement, au moment même où un vrai dialogue s’instaure, et où il fait cette douloureuse prise de conscience, pas avant ), il dira :
- …enfant, toi tu es toujours avec moi, tout ce qui est à moi est à toi

enfant, toi tu es toujours avec moi
Comme si derrière la demande explicite du cadet et celle, implicite de l’aîné, le père avait enfin vu/compris qu’il y avait, et qu’il y a là, plus qu’un désir se rapportant au domaine de la possession des biens matériels.

Le convergence de l’histoire du cadet d’avec celle de l’aîné est des plus limpides : c’est le même manque d’être, que l’avoir pensaient-ils tout deux, devait combler.

Entre le fils obéissant et le fils prodigue, il existe un lien beaucoup plus profond que ce qu’il y parait en surface.

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Message par Imala Ven 6 Mar 2009 - 6:54

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant




30. Et ton fils que voilà revient. Il a englouti ta fortune avec des putains, et tu immoles pour lui le veau gras !

mais quand ton fils, celui-ci, est arrivé, lui qui a dévoré tes moyens d’existence avec des prostituées, tu as tué le veau gras pour lui !

Maiscelui-ci ton fils et non pas : mon frère !
Comment mieux dire la souffrance de l’exclusion ? Celui-ci, Lui il est ton fils, Celui-ci, lui tu le traites en fils, pas moi ! Non, pas moi !

Lui qui a dévoré tes moyens d’existence avec des prostituées, tu as tué le veau gras pour lui !

Qui a dévoré… le verbe dévorer ici, rappelle le désir du cadet d’être bourré des caroubes…
Mais finalement, l’aîné, qu’en sait-il vraiment de ce que son frère a vécu ? Car précisément le cadet n’a jamais pu être comblé par cette vie désespérée/sans porte de salut !
Il n’a jamais pu, pas plus que l’aîné, ni que tous les salariés du père, mordre dans la vie à pleine dent !!

Tes moyens d’existences… L’aîné nie au cadet les droits qu’il s’est nié à lui-même.
Les moyens d’existence n’était plus ceux du père exclusivement, mais étaient devenus ceux du cadet et de l’aîné lors du partage de l’héritage.
Dire : tes moyens d’existence souligne à quel point la liberté est une notion étrangère à son cœur, combien l’aîné a rejeté les tentatives à être de son frère, et combien il est au plus loin de la réalité quand au succès de ces tentatives.

Cette violente diatribe : Lui qui a dévoré tes moyens d’existence avec des prostituées, tu as tué le veau gras pour lui ! — démontre à quel point lui, l’aîné, se sent inconsciemment spolié dans sa propre quête : il pense que son frère a accédé à cette vie en plénitude alors que lui non, mais n’ayant jamais osé revendiquer quoi que ce soit, il confine son frère dans une condamnation morale des plus suspecte : avec des prostituées !

… Il est enfermé dans une colère qui lui vient de loin, comme le cadet était enfermé dans ses sentiments d’indignité.

Tu as tué le veau gras pour lui… Lui qui pensait être intégré, inclus, accepté à cause de ses mérites, de son travail et de son obéissance, croit découvrir qu’il est exclu de la maison, ainsi que de la joie, alors que son frère, lui, est maintenant dedans.

Il avait tout dévoré et voilà que de surcroît, il a le veau gras !

Pourtant, rien dans ce que dit le jeune serviteur, puis le père dans la parabole, ne laisse entendre que le cadet se réjouit.

Le veau gras avait été mentionné une première fois comme étant le symbole de la joie du père.
Une deuxième fois par le jeune serviteur qui, en ne mentionnant pas la joie du père, prendra dans sa bouche, l’aspect d’un sacrifice de louange : "ton père à tué le veau gras parce qu’il l’a reçu en bonne santé".
Puis, enfin une troisième fois, par l’aîné, et qui prend alors l’apparence d’une injustice et d’une absurdité.

L’aîné ne dira pas : tu a tué le veau gras pour que quelqu’un, l’autre, ton fils, mon frère, ou toi se réjouisse, il dira : tu as tué le veau gras pour lui = pas pour que, mais parce que !

Parce que d’une manière absurde et incompréhensible tu l’aimes, lui, et tu t’es réjouis pour lui.

A suivre…
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Message par Invité Ven 6 Mar 2009 - 8:26


Je reviendrai lire ce fil à l'aise. Voilà une approche intéressante, constructive, concrète ! Et qui peut intéresser tout le monde, croyants et non croyants. Pfffffff ça fait du bien
bravo

Pour répondre à la question de Gereve
Mais fallait-il une parabole pour en arriver à ta vision des choses ?
je dirais qu'il y a une différence entre comprendre avec son intellect et comprendre profondément, avoir une cognition, assimiler un concept, l'intégrer dans sa vie.

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Message par Imala Sam 7 Mar 2009 - 18:36

leela a écrit:
Je reviendrai lire ce fil à l'aise. Voilà une approche intéressante, constructive, concrète ! Et qui peut intéresser tout le monde, croyants et non croyants. Pfffffff ça fait du bien
bravo

Pour répondre à la question de Gereve
Mais fallait-il une parabole pour en arriver à ta vision des choses ?
je dirais qu'il y a une différence entre comprendre avec son intellect et comprendre profondément, avoir une cognition, assimiler un concept, l'intégrer dans sa vie.

Merci Leela,

Je suis contente d'avoir un retour positif supplémentaire. Cela m'encourage à continuer.

*** *** ***

(Suite...) Traduction Chouraqui et C.Tresmontant


31. Il lui dit: ‹ Enfant, toi tu es toujours avec moi. Tout ce qui est à moi est à toi.

Il lui dit… le père n’avait pas parlé au cadet, mais il parle à l’aîné.

Le cadet était enfermé dans un sentiment de culpabilité mortifère.
L’aîné bout de colère.

Lorsqu’une personne est enfermée dans l’enfer de la culpabilité, rien ne sert de parlementer, car rien ne peut la convaincre du contraire, si ce n'est les gestes concrets de l'amour ; par contre, la colère peut être apaisée lorsque attitude et réponse travaillent ensemble pour le bien de celui qui nous affronte.

Le père avait refusé d’entrer dans l’univers de l’auto-accusation et de la culpabilité du cadet, il refuse d’entrer dans l’univers de l’accusation et de la justification de l’aîné, et il trouvera les mots pour tenter de sortir l’aîné de cet univers.

Le père ne se laisse plus exclure, rejeter, et progressivement, il accède à la relation vivante : aux gestes envers le cadet, il relaie la parole envers l’aîné : il entre en dialogue. Et cette fois ce ne sont pas seulement des gestes qui diront la compassion et la tendresse maternelle du père, mais des mots : enfant, toi tu es toujours avec moi… c'est au moment où il dit : enfant, qu’il réalise (il parle au présent) qu’il le porte (comme une mère porte son enfant :... tu es toujours avec moi), et le portera toujours en lui !

Le père parle au présent, un présent qui engage l’avenir : tu es toujours avec moi.

Tu es toujours avec moi, non pas : contrairement à ton frère qui ne l’a pas été toujours, mais parce que je te reconnais : tu es mon enfant, le fruit de mes entrailles, l’enfant que je "porte" en moi…

Ce qu’il a fait au cadet, il le dit à l’aîné : tout ce qui est à moi est à toi : habit, anneau, sandales, veau…
Tout ce qui est essentiel à la vie, bien affectif, spirituel et matériel lui appartient aussi bien qu’au père.

L’aîné avait voulu être à la place du cadet (bénéficier du veau gras) et être à la place du père (se réjouir avec ses amis), ce qui revient à éliminer l’autre parce que ce qu’il est se réduit à ce qu’il a. Le père répond : quoi que je puisse avoir, toi tu es toujours avec moi, tu existes toujours pour moi, tu ne te confonds pas, (plus?) avec mon avoir, si bien que ce que j’ai ne pourra jamais prendre ta place, me combler, t’éliminer de ma vie.

Et en précisant : tout ce qui est à moi est à toi, il l’assure qu’il a, en terme de vie, potentiellement, exactement pareillement que lui, le père.

Là aussi, tout y est.
Et la même question se pose pour l’aîné : parviendra-t-il alors qu’il entend le père, et peut par la même occasion comprendre que l’objet de son désir, de son besoin le plus profond est à portée de main, accéder à suffisamment d’être en lui, pour, à son tour, faire les gestes d’appropriation ?

A suivre...
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Message par JPG Dim 22 Mar 2009 - 15:00

Bonjour, Imala

Plus haut, je vous dis que j'attendrai votre conclusion...

Mais déjà, avant qu'elle ne vienne, bien qu'elle soit proche, je ne me retiens plus. Je viens de relire votre travail en ne considérant aucunement d'où vous aviez tiré le sujet de votre analyse. Cela pour me conduire à ne tenir compte que du texte en examen.
J'en viens à vouloir construire une parabole pour vous illustrer comment je vois votre travail.
"..."
Je ne le ferai pas, je vais plutôt vous l'écrire directement. Avez-vous seulement essayé de comprendre cette parabole, dans son contexte? Car là, je ne lis qu'une critique; des traducteurs, du rapporteur et de l'auteur. Peut-être n'était-ce votre seul but? Je l'ignore. Auquel cas, excusez mon intervention pour remettre le texte dans son environnement, duquel privé, nous pouvons lui faire dire n'importequoi.

Cette parabole, dans son contexte, est pourtant bien simple; je donne ici le complément :
JN Darby, dans Luc, 15 a écrit:
1 Et tous les publicains et les pécheurs s’approchaient de lui pour l’entendre.
2 Et les pharisiens et les scribes murmuraient, disant : Celui-ci reçoit des pécheurs, et mange avec eux.
3 Et il leur dit cette parabole, disant :
4 Quel est l’homme d’entre vous, qui, ayant cent brebis et en ayant perdu une, ne laisse les quatre-vingt-dix-neuf au désert, et ne s’en aille après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait trouvée ?
5 et l’ayant trouvée, il la met sur ses propres épaules, bien joyeux ;
6 et, étant de retour à la maison, il appelle les amis et les voisins, leur disant : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé ma brebis perdue.
7 Je vous dis, qu’ainsi il y aura de la joie au ciel pour un seul pécheur qui se repent, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance.

8 Ou quelle est la femme, qui, ayant dix drachmes*, si elle perd une drachme, n’allume la lampe et ne balaye la maison, et ne cherche diligemment jusqu’à ce qu’elle l’ait trouvée ?
9 et l’ayant trouvée, elle assemble les amies et les voisines, disant : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé la drachme que j’avais perdue.
10 Ainsi, je vous dis, il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent.
— v. 8 : drachme : monnaie d’argent grecque équivalent à peu près au denier romain.
11 Et il dit : Un homme avait deux fils ;
12 et le plus jeune d’entre eux dit à son père : Père, donne-moi la part du bien qui me revient. Et il leur partagea son bien.
13 Et peu de jours après, le plus jeune fils, ayant tout ramassé, s’en alla dehors en un pays éloigné ; et là il dissipa son bien en vivant dans la débauche.
14 Et après qu’il eut tout dépensé, une grande famine survint dans ce pays-là ; et il commença d’être dans le besoin.
15 Et il s’en alla et se joignit à l’un des citoyens de ce pays-là, et celui-ci l’envoya dans ses champs pour paître des pourceaux.
16 Et il désirait de remplir son ventre des gousses que les pourceaux mangeaient ; et personne ne lui donnait [rien].
17 Et étant revenu à lui-même, il dit : Combien de mercenaires* de mon père ont du pain en abondance, et moi je péris ici de faim !
18 Je me lèverai et je m’en irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi ;
19 je ne suis plus digne d’être appelé ton fils; traite-moi comme l’un de tes mercenaires*.
20 Et se levant, il vint vers son père. Et comme il était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, et, courant [à lui], se jeta à son cou et le couvrit de baisers.
21 Et le fils lui dit : Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.
22 Mais le père dit à ses esclaves : Apportez dehors la plus belle* robe, et l’en revêtez ; et mettez un anneau à sa main et des sandales à ses pieds ;
23 et amenez le veau gras et tuez-le ; et mangeons et faisons bonne chère ;
24 car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils se mirent à faire bonne chère.
25 Or son fils aîné était aux champs ; et comme il revenait et qu’il approchait de la maison, il entendit la mélodie et les danses ;
26 et, ayant appelé l’un des serviteurs, il demanda ce que c’était.
27 Et il lui dit : Ton frère est venu, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il l’a recouvré sain et sauf.
28 Et il se mit en colère et ne voulait pas entrer. Et son père étant sorti, le pria.
29 Mais lui, répondant, dit à son père : Voici tant d’années que je te sers*, et jamais je n’ai transgressé ton commandement ; et tu ne m’as jamais donné un chevreau pour faire bonne chère avec mes amis ;
30 mais quand celui-ci, ton fils, qui a mangé ton bien avec des prostituées, est venu, tu as tué pour lui le veau gras.
31 Et il lui dit : [Mon] enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi ;
32 mais il fallait faire bonne chère et se réjouir ; car celui-ci, ton frère, était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.
— v. 17, 19 : serviteurs, salariés. — v. 22 : litt.: la première. — v. 29 : servir, être esclave, comme Matthieu 6:24.
Le début du chapître place le contexte de la parabole (V. 1 et 2). Jésus, avec les deux premières parabole, répond à l'hypocrisie des pharisiens et des scribes qui ont de mauvaises pensées à son égard en ce qu'il reçoit les publicains et les pécheurs.
La troisième parabole, celle que vous critiquez, répond au dédain des premiers de savoir que les pécheurs repentant seront reçu avec grande joie et festivité; les humbles seront de la fête, alors que les orgueilleux ...

Simplement!

JP


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Message par Imala Dim 12 Avr 2009 - 12:09

Bonjour JPG,

Car là, je ne lis qu'une critique

Alors vous lisez mal, car quand à moi, quelles que soient les explications bien fondées que l'on peut me donner d'une parabole, je l'entends à ma manière propre. La parabole se nourrit de mon imagination et de mon affectivité. Je ne reste jamais extérieure à une parabole, auquel cas, on pourrait aisément me convaincre que ceci signifie cela, et cela : ceci ! Mais on me ferait violence, et je resterais sur ma faim.

Personnellement je crois qu'en chaque parabole un champ libre a été intentionnellement laissé par le Christ, que chaque auditeur, ou auditrice était, et est encore, seul-e à pouvoir investir avec son imagination propre et la richesse unique de sa vie affective.

Bien entendu cette manière de faire va à l'encontre des attentes de la religion naturelle qui "ne veut pas des paraboles" (J.D.Crossan) mais "des préceptes et des programmes", elle veut "qu'elles nous disent exactement que faire, tant la frayeur est grande de se trouver face aux silences de solitude à l'intérieur des paraboles", mais les paraboles elles, refusent de répondre.

La troisième parabole, celle que vous critiquez, répond au dédain des premiers de savoir que les pécheurs repentant seront reçu avec grande joie et festivité; les humbles seront de la fête, alors que les orgueilleux ...

Pour moi, aucune traduction conceptuelle ne rend le contenu d’une parabole de façon adéquate et définitive. Au contraire, elle fournit à la réflexion une matière inépuisable.

Bien que les commentateurs ne cessent de parler de l’amour, du pardon, de la miséricorde au sujet du père de Lc 15, aucun de ces mots ne figure dans le texte, et ce n’est pas un hasard : gestes, paroles, comportements sont ceux de la vie quotidienne, et leur sens n’est pas plus facilement déchiffrable que dans la vie quotidienne.
Expliquer par exemple le baiser du père par sa générosité, c’est renvoyer le père à lui-même et mutiler la parabole. C’est la priver de cette dimension insaisissable qui, dans le non-dit des images, en appelle, chez le lecteur, au non-dit du cœur.

En racontant une parabole, Jésus quittait à dessein le terrain de l'argumentation où l'un a nécessairement raison et l'autre tort : il s'agissait pour lui d'éviter cette rupture de dialogue qui finit toujours par engendrer l'argumentation quand elle n'est pas relayée par autre chose. La parabole du fils prodigue réalise pleinement ce but : elle crée un nouvel espace de vie qui aimante l'intelligence hors du cercle argumentatif.

"Nulle part, Jésus ne dit ce qu’est le royaume" écrit Paul Ricoeur. "Il se borne à dire à quoi il ressemble". De sorte qu'il faut le langage opaque de la parabole, pour comprendre que si ce monde-ci est porteur d’une autre réalité, celle du royaume, elle n’est pas accessible par la voie des concepts.

Jésus n'enseignait pas par concepts, mais par image.
Seule le langage de l’image permet de casser la prétention de pouvoir réduire le Royaume de Dieu à nos petites conceptions de l'amour, de la miséricorde, ou du pardon qui est celle de l'intelligence humaine. En effet, si ce langage s’adresse aussi à l’intelligence, le sens vers lequel il oriente est non seulement à découvrir mais à édifier soi-même.

Simplement!

Il n'y a rien de simple dans la radicalité d'un questionnement personnel et donc d'un choix de vie devant Dieu. Le langage de l'image que privilégie le Christ dans la parabole, pose question à l'individu en ce qu'il se déploie dans une sphère qu'il ne peut partager avec personne : ce qu'évoquent les images, ce qu'elles mettent en route, ce qu'elles entraînent varie d'un individu à l'autre parce que le langage de l'image a partie liée avec la vie affective. Par le recours à l'imaginaire, l'individu qui s'identifie à l'acteur de la parabole se trouve entraîné vers cette zone profonde de son affectivité et de sa vie fantasmatique qui, n'obéissant à aucune consigne de bien-faire et évoluant hors de tout repère rationnel, lui pose question.

J'ai dit plus haut que la parabole est invitation au voyage...

...Ici, je n'ai fait que partager certains de mes paysages...


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Message par Imala Mer 15 Avr 2009 - 9:28

(...Suite)Traduction A.Chouraqui et C.Tresmontant


32. Mais il faut festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voilà était mort, et il ressuscite; il était perdu, et il est retrouvé

Mais il fallait se réjouir et être joyeux, parce que ton frère, celui-ci, était mort et qu’il est venu à la vie, perdu et il a été trouvé.

Nul ne peut prétendre faire de la joie une obligation, car nul ne peut être joyeux sur commande.
Il fallait se réjouir, être joyeux = voix passive.
Elle suggère que la joie du père, comme la compassion, était intervenue d’ailleurs. Le père a été pris par la joie comme il l’avait été par la compassion. L’impératif : il fallait rend compte d’une évolution pour le père. Dans ce sens, il fallait n’a pas une connotation d’obligation pour le fils aîné ou pour tout autre personne invitée à la fête, non, mais est une constatation : il fallait = parce que… je suis dans la joie !!
Pour le père cela ressemble à une prise de décision, à un acte d’adhésion au radical changement d’orientation concernant la relation à ses fils. Le père selon sa propre évolution, a lui aussi répondu à un désir d’inclusion dans la joie à être, plutôt que dans celle, factice de l’avoir.

...il fallait se réjouir et être joyeux, parce que ton frère

Manière de dire et de rappeler aux oreilles de l’aîné une réalité occultée : ton frère, donc ton semblable ! Donc susceptible d’être en proie aux mêmes affres que toi !

Ton frère, celui-ci (32) faisant écho à Mon fils, celui-ci (v.24)… Comme pour que l’aîné sache, et sache bien que puisque "ton frère celui-ci est mon fils", tu ne peux que l’être aussi, puisqu’il est ton frère, celui-ci !!


Celui-ci, mon fils était mort et il a repris vie (v.24)
Ton frère, celui-ci, était mort et il est venu à la vie (v.32)


Celui-ci dans la bouche du père, n’a pas cette connotation négative que l’on peut entendre dans la bouche de l’aîné, en fait c’est comme si avant d’être fils, avant d’être frère, il est "celui-ci" : un individu unique, différencié et un vis-à-vis à part entière.

Venu à la vie plutôt que : il a repris vie
Comme si entre-temps, le père avait perçu que cette mort était bien plus grave qu’il n’y paraissait ! Il est venu à la vie… Comme si cette mort était avant la vie, originaire… comme si le fils cadet n’avait jamais vécu.

C’est une parole forte et qui dit combien le silence du père du début de la parabole était mortifère : le père n’a pu voir le fils vivant qu’au moment où lui-même reprend vie. Et cela s’est fait en deux temps : Il dit :
* il a repris vie au moment où lui-même sort enfin de ses divers engourdissements ; et :
* il est venu à la vie au moment précis, et seulement à ce moment là, où lui-même entre réellement en relation avec son aîné.
C’est extrêmement parlant : l’être humain est, existe en plénitude, colle à la vie lorsqu’il est en relation

Ce n’est plus seulement ses biens, les moyens d’existence qu’il partage maintenant avec ses fils, c’est lui-même. Il se donne enfin à connaître. Il n’a plus peur. Il ne se retranche plus ni dans le silence, ni dans l’effacement. Il donne de ses "tripes/entrailles". Il se donne. Il n’a pas peur de se montrer vulnérable.

Car, n’est-ce pas, qu’est-ce qui peut rendre l’autre si vulnérable à nos yeux, si ce n’est l’amour offert, l’amour tendu à bout de bras, dans un geste de supplique ?

Plus rien ne le retient : ni honte/embarras, ni humiliation, ni aucune crainte. Et il agit comme si il était urgent, vital, comme si c’était réellement une question de vie ou de mort d’agir ainsi.
Il est dans une impatience positive, il n’attend pas que l’aîné revienne à plus de raison, ne lui fait aucune morale, aucun reproche, ni ne l’exhorte en rien. Il lui parle le langage du cœur. Le langage de l’amour.

Comment aurait-il su ce qu’il était urgent et vital de faire, si lui, le père n’avait pas dû l’apprendre d’une manière ou d’une autre ? Et comment l’a-t-il appris, si ce n’est au contact de la souffrance du non-être de ses fils, venant raviver sa propre souffrance de non-être ?

Etre et avoir…

Ce qui est de l’ordre de l’avoir sépare. Ce qui est de l’ordre de l’être réunis.

En disant qu’il ne garde rien pour lui tout seul, le père introduit l’aîné dans l’ordre de l’être.

Gestes pour le cadet, paroles pour l’aîné, gestes ou paroles qui ensemencent une même assurance : je suis premier dans le cœur du père !

Primauté que chacun des deux fils est en droit de croire, puisque le père, pour le cadet avait fait sortir le premier vêtement, avait couru au-devant lui comme si lui seul comptait, et enfin pour l’aîné, tout autant, lorsqu’il sort lui-même de la maison pour aller au-devant de cet autre fils, laissant cadet, fête et convives comme si seul l’aîné comptait.

Imala

A suivre…
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