V / BF - Se découvrir - Commentaires

Suite aux suggestions de Lila, j'ouvre un fil parallèle à la discussion entre virgule et moi...

Vos commentaires y sont tous les bienvenus...

Bonne journée !

On peut donc poster ici ? (Je n'ai pas lu la discussion entre virgule et toi)

oui, c'est le "fil parallèle", la règle de cette section étant le dialogue entre deux personnes, comme on avait fait aussi

Je reproduis ci-dessus l'explication de bferrand sur ce que représentent les mathématiques pour lui :

bferrand a écrit: Puis, parce que c'est un langage, une science abstraite, ce que j'aime dans l'abstraction ce sont la polyvalence, les possibilités de généralisation, et la puissance d'expression qui en découle. Ensuite, car c'est un domaine qui ne laisse pas de place à l' "à peu près" une fois que l'on se donne un système d'axiomes cohérent. La cohérence me plait beaucoup, puisqu'elle est exempte de toute tricherie. L'avantage aussi est que l'on peut choisir librement ses axiomes multipliant ainsi ce qu'il est possible de modéliser. J'aime aussi le fait que l'édifice mathématique renseigne beaucoup sur la structure même du mental qui l'a créé. En fait, faire des mathématiques, c'est mettre sur papier les méthodes que le mental utilise sans en avoir conscience, puis enrichir et découvrir, à partir de cela. Pour finir, j'ai l'impression que l'édifice mathématique, est une sorte de pièce architecturale majestueuse, plongée dans l'obscurité. On tente de s'en représenter les détails avec une lampe de poche, du coup, au début, on ne voit que des parcelles éparses de la structure. Mais à force de balayer avec la lampe, on fini par avoir une idée plus nette du genre d'architecture dans laquelle on se trouve. Puis la lampe elle-même (la "vision" mathématique) devient de plus en plus puissante et large, ce qui fait qu'on parviens à soutenir d'un seul regard des pans entiers de la structure, et à en percevoir la beauté, l'harmonie de ses formes. Mais on se rend toujours compte que la structure est bien plus grande que ce que l'on avait envisagé à la base. C'est aussi ce processus de "révélation progressive et infinie de la beauté" que j'aime beaucoup.

Je précise que j'ai toujours été très peu attirée par les maths, et j'avoue ne jamais avoir maîtrisé cette forme de pensée.

Ce qui m'interpelle tout de même, c'est la façon dont bferrand décrit les maths, dont il vient à dire que c'est un Art : j'y ai trouvé des rapprochements étonnants avec le mode de pensée poétique, sauf que :
- Les maths ne font intervenir que des concepts (si j'ai bien compris)
- En maths, l'affectif n'intervient pas
- Il n'y a pas possibilité de "tricherie"

Attention, je ne veux pas dire que l'authentique poète "triche" à longueur de temps. Du moins, face à lui-même, ce qu'il énonce est authentique. Mais il a une énorme liberté quant aux choix qu'il opère dans sa démarche. Il peut dire si ça lui chante, "le ciel est jaune", ou "le ciel est en guimauve", si ça convient à la prosodie, à la rime et au sentiment qu'il veut susciter. C'est là qu'intervient l'énorme différence avec l'Art des mathématiques. En maths, on découvrirait peu à peu un magnifique ensemble architectural, en s'éclairant d'une "lampe de poche" (le raisonnement). J'ai l'idée que cette architecture existe indépendamment des individus, en quelque sorte elle serait à la fois "intérieure" et "extérieure". Elle a une structure propre, qu'il faut découvrir.
La poésie maintenant : elle opère avec des mots, des sons, des images. Le mots sont soumis à des lois (celles de la grammaire et celles de la sémantique). On ne peut pas trop jouer avec les règles de la grammaire, même en poésie. Par contre, on peut jouer avec le sens des mots et ce qu'on appelle les paradigmes. Celà tient aussi de la musique : les combinaisons possibles sont infinies. Dans ce domaine, le poète est presque entièrement libre (je dis presque car il est limité par ses propres capacités et par sa tournure d'esprit). Le mathématicien aura sans doute plus de satisfaction intellectuelles que le poète : il me semble qu'il opère dans un champ bien défini, et que quand il trouve un concept mathématique, ce concept est objectif.

Ah ! La nature de "l'effort" maintenant. Personnellement, quand j'ai l'envie d'écrire de la poésie, et quand je m'y mets, je ressens comme une difficulté très difficile à surmonter : c'est que je ne sais pas, à l'avance, où "je" veux aller, ni ce que "je" cherche. Il m'arrive d'être vraiment effrayée par l'infini liberté de l'acte d'écrire... Je ne sais pas si vous saisissez ce que je veux dire.

D'un autre côté, le poète a aussi une satisfaction intellectuelle du même ordre : s'il arrive à faire coïncider l'expression par les mots avec le sentiment obscur qui veut s'exprimer à travers lui. Il accède aussi, une fois le poème couché sur le papier, à une "vérité".

Qu'en pensez-vous ?