La liberté est-elle liberticide au fond ?

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Message par sypqys Jeu 12 Avr 2012 - 22:08

Bonjour,


Oui. Éternel débat. Comment déterminer si la liberté est vraiment la porte ouverte sur une liberté totale. Qu'est-ce être libre puisqu'on ne la jamais été. Nous sommes conditionnée dans un monde ou on a pas le choix, on nous impose des choses, nous propose des choix à faire.. Etc.

Alors selon vous, si nous étions libre, y aurait-il des limites ?

Peut-on être totalement libre avec notre libre arbitre ?


Merci

à+

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Message par Escape Ven 13 Avr 2012 - 11:13

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Bonne question !

La devise d'un journal satirique est << La liberté de la presse ne s'use que si on ne s'en sert pas >>

La liberté n'est pas une substance qui peut servir et sinon être entreposée, comme un liquide dans une bouteille. On dirait qu'elle s'actualise.

Cependant, << trop de liberté nuit à la liberté >> dirait la sagesse chiraquienne.

Dira-t-on donc que la liberté est comme l'arc, dont compte la bandaison, vers la cible ?

.
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Message par Passiflore Sam 14 Avr 2012 - 9:19

La liberté… Je n’en connais qu’une : un "état" que je ne vais pas chercher à définir, que cela est impossible.
Sûr ça ouvre pas la perspective de longues discussions ! sourire

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Message par Seldon Sam 14 Avr 2012 - 11:57

En parlant de liberté, je repense à mon épreuve de philo au bac : être libre, est-ce ne rencontrer aucun obstacle ?
Ça m'avait bien inspiré d'ailleurs. Pour ma part, je pense que c'est dans l'adversité, dans la contrainte que l'on est le plus apte à exprimer sa liberté. Après, je pourrais tergiverser pendant des heures avec un sujet aussi vaste. Il serait bon de préciser la réflexion.
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Message par Passiflore Dim 15 Avr 2012 - 5:33


L’état de liberté n’est lié à aucune condition, ou alors ce n’est pas de liberté dont il s’agit.


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Message par Uranus Dim 15 Avr 2012 - 8:26

Il ne peut y avoir de "totale" liberte dans ce monde ou nous sommes soumis aux limitations physiques.
Par contre il existe un sentiment de liberte, celle que nous apporte la conscience de soi.
En user au mieux est non seulement un droit mais une mission pour toute homme qui veut se realiser.

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Message par Geveil Dim 15 Avr 2012 - 8:27

Plusieurs discussions ont déjà été ouvertes sur la nature de la liberté, dont celle-ci, par exempleICI

Le sujet ouvert par mon confrère tigre Sybquys n'est pas la définition de la liberté, mais est-elle liberticide ? Autrement dit, si on laisse tout faire, ne débouche-t-on pas sur le fascisme, la loi du plus fort qui tueras la liberté ?
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Message par Uranus Dim 15 Avr 2012 - 9:47

Si on laisse tout faire on risque plus d'atteindre le desordre que le fascisme, qui est un etat social contraire aux libertes individuelles.
La loi du plus fort ? Alors on empeche que le fort soit libre afin que le faible le soit ??? lol!

Plus serieusement, l'instinct gregaire de l'etre humain fait que celui ci ne peut vivre sans regles sociales; la plupart du temps tellement inconscientes qu'ils ne les voient meme plus et se croit totalement libre.
Donc, selon moi, la liberte totale, telle que posee dans cette question, est un concept qui ne repose sur aucune realite sociale.


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Message par Ling Dim 15 Avr 2012 - 9:59

Un sujet dont le titre est construit sur un paradoxe est-il sérieux?

La liberté est la faculté d'agir selon sa volonté en fonction des moyens dont on dispose sans être restreint par le pouvoir des autres. Elle est la capacité de se déterminer soi-même à des choix contingents. Elle est perçue différemment selon la psychologie du sujet :

négativement : C'est l'absence de soumission, de servitude, de contrainte.
positivement : C'est l'autonomie et la spontanéité du sujet rationnel ; les comportements humains volontaires se fondent sur la liberté et sont qualifiés de libres.
relativement : C'est la « liberté de faire tout ce qui n'est pas interdit » , la « liberté de dire ou de faire ce qui n'est pas contraire à l'ordre public ou à la morale publique » ou encore « La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres » (de John Stuart Mill), ou parfois reformulé positivement,
« La liberté des uns commence là où elle confirme celle des autres ».

http://fr.wikipedia.org/wiki/Liberté

La Liberté n'est pas l'absence de règles.

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Message par zizanie Dim 15 Avr 2012 - 22:21

La liberté du capitalisme financier n'est pas liberté mais tyrannie.
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La liberté est-elle liberticide au fond ? Empty La liberté est-elle liberticide ?

Message par Dari Lun 16 Avr 2012 - 2:24

Il me semble que la liberté émerge pour l'être humain quand il commence à réfléchir – c'est-à-dire, d'une part, à faire des raisonnements qui correspondent avec ce sur quoi il raisonne (le fait de penser logiquement) et d'autre part à avoir des intuitions.

Je dirais qu'on ne peut pas démontrer la liberté, que l'on peut seulement l'intuitionner.

D'après la conception que j'en ai, la liberté est hors de toutes les limites puisqu'elle est le dépassement de notre condition finie, l'accomplissement de notre être dans la totalité (mais bien sûr c'est ma réflexion personnelle de la liberté : chaque conscience n'est qu'un "miroir qu'on promène le long du chemin" pour emprunter les mots de Stendhal).

La liberté comme l'a définie Kant (« l'autonomie de la volonté ») est effectivement « une porte ouverte sur une liberté totale » : cependant une fois la porte ouverte il faut parcourir la Voie, et s'orienter dans la multitude des chemins dans le monde.

Je ne crois pas que l'activité d'une conscience libre réside uniquement dans une succession de choix ; il me semble plutôt que la liberté est un choix radical d'orienter sa vie non pas en fonction des honneurs du monde mais d'après un cheminement existentiel vers la sagesse. Quand je dis la sagesse, je veux dire le bien que l'on intuitionne en soi, pas celui qui nous est suggéré de l'extérieur.

Trouver l'équilibre entre le corps, l'âme et l'esprit qui permettent le plus de perfection... il me semble que pour cela il faut abandonner la notion de libre-arbitre c'est-à-dire l'idée du jugement rationnel ; d'après ce que j'en sais, les hommes les plus sages ne jugeaient pas le réel, mais la notoriété de leur sagesse venait au contraire de leur capacité à être détachés des contingences terrestres. Cependant, cela suppose la liberté de penser et de mouvement, donc la liberté politique...

Évidemment, la liberté totale demeure un idéal : un phare dans la nuit de notre ignorance !

Pour conclure je crois que la liberté n'est liberticide que si elle est comprise comme l'objectivation du monde – le fait d'être un sujet désirant des objets – et non pas comme le détachement à l'égard du désir, détachement nécessaire à l'autonomie. Je ne dis pas qu'être libre c'est ne plus rien désirer mais que la liberté conçoit le désir comme une puissance d'être, et pas comme un manque (c'est l'éternel débat Platon et Spinoza)...

J'ajouterai, même si c'est sans doute un peu hors-sujet, que Romain Gary dit que "la liberté est fille des forêts" : je crois qu'il veut dire par là qu'il faut savoir vivre caché du monde si le monde menace notre liberté...
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La liberté est-elle liberticide au fond ? Empty Pour un devenir libre de la démocratie

Message par Dari Lun 16 Avr 2012 - 18:04

zizanie a écrit:La liberté du capitalisme financier n'est pas liberté mais tyrannie.

Je suis d'accord avec vous quant à la nature illusoire de ce que la pensée dominante appelle "liberté d'entreprendre" ; cependant je veux croire qu'il est encore possible d'être libre dans le monde actuel.

Si les journalistes de la télévision nous endorment avec des récits de fait divers tragiques, renforçant notre fatalisme et notre pessimisme face à l'existence, augmentant insensiblement le degré de notre résignation, l'évocation des catastrophes à venir au contraire peut avoir pour mérite de nous sortir de notre inertie.

Je veux parler plus précisément de ce désastreux sentiment d'impuissance qui s'empare de l'esprit à la pensée que le capitalisme à l'échelle planétaire concernera bientôt sept milliards d'humains, ce qui rend ingérable, entre autre, le fait d'instaurer en France une politique économique pouvant préserver notre système social et ce qu'il représente : la valeur absolue de toute personne humaine.

Ingérable à l'échelle planétaire, c'est certain : vouloir imposer le modèle occidental de l’humanisme à la pensée chinoise serait, me semble-t-il une régression vers le colonialisme – et à l'échelle européenne, serait-ce encore possible ?

L’Europe politique fut indéniablement un beau rêve humaniste ; les « États Unis d'Europe » que prophétisait Victor Hugo au XIXème siècle était pourtant bien différents de ce qu’est l'Europe économique actuelle – Europe diminuée, tremblant sous le diktat de la « finance mondiale » et de la soi-disant « dette » que nous aurions (d’après la foule d’économistes qui encore aujourd’hui légitiment la pensée dominante fondée sur l’individualisme) contracté envers les traders et autres initiés délictueux, eux qui s'enrichissent en spéculant sur les angoisses qui sous-tendent inconsciemment les décisions économiques – accumulation de capital monétaire spoliant les innovations, la créativité, l'investissement sur le long terme.

Aujourd’hui le seul moyen de sauvegarder cette prise en charge des droits humains fondamentaux dans nos démocraties (pouvoir être éduqués, soignés et protégés) serait de poser à nos voisins européens une alternative claire, en les invitant à prendre des mesures communes pour réguler les flux d’argent et de biens de consommation à l’intérieur de l’espace Schengen.

Cependant, à travers le système des agences de notation, les pays européens en sont à scruter les difficultés du voisin et à spéculer sur son enlisement ; cela en dit long sur le climat de méfiance qui règne en Europe actuellement : chacun attend de voir de quel côté le navire va prendre l'eau, tout en lorgnant les places restantes dans les embarcations de secours ; et nous jouons toujours du violon alors que le bateau tout entier menace de chavirer.

Le système de la dette, c'est là le nœud du problème, celui qui a déclenché la crise des subprimes : Nietzsche explique dans la Généalogie de la morale qu'en allemand le mot dette (das Schuld si mes souvenirs sont bons) veut dire à l'origine « faute » – ce qui laisse penser qu'à l'origine toute dette est une dette morale. « Ce que l’on doit c’est faire son devoir », stipule en substance Le contrat social : la liberté civile comprise comme « la volonté générale » qui s’engage à « obéir aux lois qu’elle s’est prescrite ».

Il est temps de cesser de s'illusionner sur le degré de cynisme de nos responsables politiques ; la « moralisation du capitalisme » promise en 2008 par Nicolas Sarkozy devait en fait être comprise rétrospectivement comme une éducation des salariés aux lois capricieuses des marchés : une moralisation basée sur la « rigueur ».

Ainsi la Grèce fut-elle punie d'avoir pu jadis profiter d'une période de croissance forte, quand elle entra, il y a cinquante ans tout juste, dans l’Union Européenne punie de n'avoir pu répondre aux critères de l'économie mondiale. Récemment un ancien ouvrier syndicaliste d'Athènes, devenu entre-temps chômeur, s'est jeté du haut d'un toit pour protester radicalement contre la misère à laquelle les décisions de l'Union Européenne l'acculait indirectement : ainsi le capitalisme engendre le désespoir comme ce fut le cas il y a quelques temps aux États-Unis lors de la crise des emprunts ; des milliers de gens délogés de chez eux, puisqu'ils ne pouvaient pas rembourser leur dette.

Qu’il me soit permis un instant de revenir à Nietzsche ; dans sa Généalogie il suppose (en usant sans le dire de l'instrument interprétatif qu'est « la volonté de puissance », qui est pour lui une méthode d’investigation plutôt qu'une conception du monde à proprement parler) que la dette, la faute morale étymologiquement, était dans le commencement des sociétés humaines quelque chose de beaucoup moins abstrait que la dette financière des Etats, dette abstraite, car formulée a priori, concrète ensuite de par ses conséquences réelles. Rousseau parle d'un « état de guerre perpétuelle », quoique ponctuelle et localisée, dans l'état de nature ; Nietzsche qui se situe un peu plus tard (aux origines de la culture) est plus précis dans ce qu’il avance : pour lui à cette lointaine époque quand une dette n'était pas remboursable, la loi prescrivait comme réparation d'infliger au mauvais payeur une dose de douleur proportionnelle à la valeur de ce qu'il devait. D'après Nietzsche c'est le plaisir de voir le malheur d'autrui, c'est-à-dire la cruauté, qui compensait alors la dette contractée. L'humanité s'étant depuis moralisée, ainsi l'Europe christianisée, il y aurait eu un moment où le dressage des instincts nous aurait forcé à retourner cette violence (ce plaisir de faire souffrir autrui, qui était peut-être à l'origine tout aussi intense que celui que nous éprouvons aujourd'hui en aimant) contre soi-même ; cet instinct agressif devenu refoulé, retourné contre lui-même, « spiritualisé », aurait donné la « mauvaise conscience » ; de là découlant, avec la diffusion de la norme morale, la culpabilisation des masses, fort utile au demeurant pour qui souhaite gouverner sans avoir de comptes à rendre.

C'est cette mauvaise conscience – ce doute lancinant quant à notre valeur absolue en tant qu'êtres de raison, quand tout devient relatif et que tout nous échappe – qui sclérose nos états d'esprit, encore judéo-chrétiens de par leur capacité d’espérance mais déjà désabusés par la promesse d'un avenir sombre ; de là le sentiment de l’impuissance entraînant la sclérose de nos moyens d’action : précisément ce que Nietzsche appelle le nihilisme.

Pourquoi cette digression, me direz-vous, si vous avez pris la peine de me lire jusque-là ? Je la crois déterminante pour penser différemment notre possibilité d’influer sur les choses ; ainsi Nietzsche propose-t-il de passer d’un nihilisme réactif (fondée sur la critique radicale) à un nihilisme actif : la suspension de nos habitudes pour réaliser de nouvelles manières d’être et d’agir. Il faut pouvoir penser de nouvelles pratiques collectives, si nous voulons cesser de nous sentir impuissants face aux colonnes de chiffres qui s'affichent à la Bourse : une prise de conscience est bien sûr nécessaire, mais il nous faut avant tout un plan d'action éthique si nous voulons que nos belles idées ne restent pas lettres mortes.

Tentons d’évaluer ce qu’il est possible de faire. La révolution à l'échelle mondiale est une utopie : la pensée libérale domine la planète, et il n'y a actuellement aucune organisation de défense des travailleurs semblable à celles qui existaient au dix-neuvième et au vingtième siècle ; il doit être possible en revanche d'engager un processus démocratique réformiste, qui réponde à la gravité de la situation (la probabilité que le capitalisme traverse des crises de plus en plus graves devenant graduellement toujours plus plausible) ; l'exemple de la candidature de Jean Luc Mélenchon aux élections françaises montre que l'espoir en un monde solidaire existe toujours, malgré tous les mauvais augures (cf. Moody's and co, les haruspices new age) qui influencent l’inconscient collectif des marchés : il suffit d’affiner quelque peu son projet, en le pensant non plus comme un catalyseur momentané d'espérance politique mais comme un véritable programme à appliquer pour les cinq ans à venir.

Ce programme politique est délicat à mettre en pratique ; il requiert certainement de la diplomatie et l'explication de sa nécessité. La première mesure serait cependant d'une grande simplicité ; instaurer en France, au nom de la gravité de la Crise (puisque c'est elle l’Idole vengeresse du troisième millénaire) un protectionnisme économique ; à nos voisins européens qui hurleront à la défection, nous répondrions qu'ils seraient avisés de faire la même chose chez eux pour se préserver des aléas multiples de l'économie planétaire. Ce protectionnisme, qui ne s'appliquerait qu'aux flux de capitaux et de marchandises, laissant en vigueur la liberté pour les étrangers de voyager en France, d’y travailler et d’en acquérir la nationalité (la perception problématique de l’immigration s’inversera statistiquement quand le vieillissement de la population rendra nécessaire le fait de faire venir en France des travailleurs d’origine étrangère) serait bien sûr graduel ; nous ne pouvons sans doute pas nous passer du pétrole du jour au lendemain ; du moins pourrions-nous reconsidérer les bénéfices records de Total en 2011 (plus de 10 milliards d'euros) et en investir une partie à long terme dans ce que certains économistes appellent la croissance endogène, c'est-à-dire un fort tissu social fondé sur l'éducation, la culture, les loisirs (au sens noble du terme loisir : la skole des Grecs, l'otium des Romains) garant d'un meilleur développement individuel et collectif, et donc d'une productivité accrue.

Cette première mesure aurait aussi pour but de favoriser une production écologiquement viable, par la diminution massive des coûts (tant pour l'écosystème que pour la production) causés par le transport des marchandises ; d'autre part, la division sociale du travail a produit des aberrations quant à son organisation délocalisée – d'autres coûts de transports à réduire.

Il est certain que si une telle politique, à peine esquissée ici mais qui donnerait priorité à la valeur humaine par rapport au prix marchand, pouvait redonner confiance à la majorité silencieuse de citoyens désabusés par une qualité de vie toujours plus restreinte, et que cette confiance retrouvée de la nation française dans sa politique économique permette une croissance dynamique, nous pourrions espérer que cet exemple de réussite encourage nos voisins à nous suivre dans cette voie.

Enfin s'il est vrai que notre système de protection sociale et d'accès au savoir est admiré par tous, pourquoi devrions-nous nous priver de cette admiration ? Il faut de l’amour propre pour s'autonomiser et du discernement pour pérenniser cette autonomie ; chez l'individu il n'est possible de restaurer la confiance en soi que de l'intérieur, avant de pouvoir s’affirmer face aux autres ; puisque nul organe politique n'est à même de réformer le capitalisme au niveau mondial, c'est à l'intérieur des frontières étatiques que nous pouvons agir pour un avenir meilleur.

Le risque est important, me direz-vous peut-être ; se soustraire, dans une certaine mesure, aux aléas du marché mondial pourrait s'avérer difficile, en cas de pénurie par exemple ; cependant si nous avons de quoi satisfaire nos besoins essentiels, les difficultés momentanées peuvent être surmontées avec du courage et de la patience, tandis que les crises cycliques du Capitalisme, ne pourront à terme être endiguées à l'échelle démographique planétaire.

L’autosuffisance économique est la condition de l’autonomie, autrement dit de la liberté ; c’est en régulant le marché économique à l’échelle européenne que nous pourrons, non seulement éviter que les mécanismes de l’offre et la demande n’entravent la réalisation du bonheur individuel, mais aussi à faire voir aux nations du monde qu’une organisation collective d’Etats, assurant à ses citoyens la solidarité, la protection, l’accès à la culture, peut être érigée à force de persévérance dans la nature conflictuelle des choses.

Rester au sein de la foule est toujours plus facile que de s'écarter d'elle ; pourtant pensons aux troupeaux de buffles qui foncent au galop droit dans les ravins, et donnons-nous le temps de la réflexion ; le capitalisme, s’il est régulé par des impératifs politiques éthiques, n’est pas en soi voué à la ruine ; cependant si nous n’agissons pas, nous prenons le risque de laisser les mécanismes de l’économie gouverner nos vies. Il est temps de choisir ce que nous voulons privilégier : notre sécurité, toujours provisoire, ou notre liberté inconditionnelle.
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Message par Bean Lun 16 Avr 2012 - 18:19

Être libre, c'est sortir d'un système et éviter de s’engouffrer dans un autre.
Cette liberté a un prix, encore faut-il être prêt à le payer.
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